Le syndrome de Stockholm
La crise que traverse aujourd’hui la GLNF pourrait voir dans les prochaines semaines sa résolution au plan juridique. Elle aura conduit certains à se révéler, pour notre plus grand malheur, tels qu’ils étaient réellement, d’autres à se dépasser et à s’investir dans ce conflit, et enfin la majorité silencieuse…à continuer de se taire.
Elle aura également mis en avant le formidable pouvoir d’Internet et de la communication, sans lesquels cette crise n’aurait pas dépassé les trottoirs de la Rue Christine de Pisan (rue en impasse, faut-il symboliquement le souligner…), mais également ses propres limites, notamment quand l’information l’emporte sur la vérité.
Elle aura également mis en exergue des comportements individuels inacceptables, qu’ils aient été les prémisses de cette crise chez les uns ou tentative de récupération ou de valorisation chez les autres.
La récente « prise en otage » de la GLNF par l’ex-président du Conseil d’Administration, ex-Grand Maître aurait pourtant dû dessiller les yeux des moins avertis, et l’unanimité aurait dû se faire contre les agissements de Monsieur François STIFANI.
Si des protestations vives se sont élevées, tant dans nos rangs qu’à l’extérieur, force est de constater qu’il continue de gérer directement ou indirectement les affaires de la GLNF, avec le soutien des cadres nationaux ou régionaux qu’il a mis en place, et au mépris des décisions des Tribunaux de la République.
Certes ce « terrorisme » n’est en rien comparable à celui des preneurs d’otages qui attentent hélas trop souvent à l’intégrité physique des personnes, et tout ceci, direz-vous, n’est « que » de la maçonnerie.
On peut néanmoins s’interroger sur les mécanismes qui conduisent à une telle situation et se demander par quel cheminement complexe il reste encore aujourd’hui des Maçons qui ont renoncé à l’exercice de l’un de leur bien le plus précieux: l’expression du libre-arbitre, qui les conduit encore aujourd’hui à ressentir pour le personnage à distance, en dehors de toute pression et au-delà de la simple soumission à l’autorité, une empathie certaine, expression moderne du syndrome de Stockholm.
Evidemment, tout a été fait par la communication officielle de Pisan pour présenter le personnage sous un jour favorable : pleurant au milieu de ses Grands Maîtres Provinciaux, signant à répétition des textes dégoulinant d’un pseudo-amour fraternel, écrasé par la vindicte de ceux qui n’ont rien compris à son Grand Dessein, mal-aimé parmi son peuple, en butte même à des menaces de mort !
Comment face à tel tableau ne pas se sentir concerné d’abord, puis pris de sympathie pour celui qui n’est plus combattu – à l’en croire- que pour ses seules idées, mais en raison de sa personne même, ce qui pour tout Maçon est évidemment inacceptable.
D’autant que ceux qui le combattent sont évidemment présentés sous le jour le plus noir, hommes sans morale ne cherchant au travers de cette crise qu’à prendre le pouvoir pour eux-mêmes.
Et pour que l’illusion soit complète, les dérives de l’ex-Grand Maître sont présentées comme des « avancées maçonniques » suffisamment importantes pour justifier ses actes aux yeux de ses victimes.
Sentiment de confiance, hostilité envers ses détracteurs, conceptualisation idéologique de ses actes, « amour » affiché pour ses Frères, tous les mécanismes sont en place pour que se développe chez ces victimes le syndrome de Stockholm.
Réaction inconsciente de l’individu, ce syndrome obéit à un instinct de base, celui de la survie. Dans les discours catastrophistes qui nous sont délivrés depuis plusieurs mois, la peur du chaos qu’entraînerait le départ de l’ex-Président, la mise en faillite de l’Association n’ont servi qu’à amplifier cette peur, comme en témoigne le dernier avatar du paiement des cotisations.
Le développement de ce syndrome ne semble avoir d’autre objectif que de protéger de leur propre angoisse ceux qui pensent annihiler un danger (qui reste malgré tout toujours présent) en entrant en sympathie, voire en contagion émotionnelle avec leur nouveau maître.
S’il est légitime de chercher à sauvegarder les valeurs de la GLNF en lesquelles nous croyons, on ne peut envisager un seul instant d’éprouver la moindre sympathie pour celui qui n’hésite pas à dire –fût-ce même sur le ton de la plaisanterie- devant ses thuriféraires « Les Frères ne m’aiment pas, peu importe, je ne les aime pas non plus ».
Ces propos non destinés à être rendus publics, mais pourtant avérés, doivent inciter tous ceux qui porteraient encore une quelconque estime à cet homme à s’en écarter sans délai, et surtout sans la moindre culpabilité, car il est l’unique responsable de la situation actuelle.
Pour autant, il ne faudrait pas non plus, par dépit ou déception, rejoindre les rangs de ces nouveaux gourous, résistants de la 25ème à la 33ème heure, dont les noms fleurissent ça et là et qui font déjà le siège du Souverain Grand Comité…
En mal de programme, ils abusent de la stratégie du coucou, quand ils ne s’approprient pas directement des réflexions auxquelles ils n’ont même pas contribué, maniant la sémantique avec habileté : se lever pour se présenter à un mandat électif ne signifie pas s’opposer, pas plus qu’être un candidat ne donne le droit de se considérer comme le candidat.
Aspect inattendu de cette crise où la communication est l’un des principaux vecteurs, la vérité se trouve parfois prise en otage en des lieux où l’on s’y attendait le moins.
Gardons-nous ainsi de tel ou tel, qui applique à la lettre ce constat d’Yvan Audouard : « Une information plus un démenti, cela fait deux informations pour le prix d'une ».
Quand les faits ne sont pas avérés, quand, par exemple les réunions « secrètes » ne le sont que parce qu’elles n’existent que dans l’esprit d’un « dénonciateur » qui prête à ceux-là même qui s’opposent au système, des tactiques farfelues et alternatives qui disparaissent comme elles sont apparues… et qui manie avec la même indifférence la Fraternité et la haine, on ne peut que s’interroger sur de telles stratégies qui finissent par faire la part belle à l’ex-Grand Maître.
Mais comme à l’évidence, notre inconscient collectif prend plus généralement le parti des justiciers solitaires et trouve plus sympathique de soutenir Robin des Bois que de hurler avec les loups, (et comme le rappelait en conclusion l’ami Audouard : « c'est toujours la fausse (nouvelle) qui reste dans les mémoires. »), aucun démenti ne pourra jamais contrebattre les divagations de ces Tintin-Chevaliers Blancs.
Le silence semblerait donc la seule arme à leur opposer, s’il ne risquait de passer pour une marque de complicité, ou pire encore comme la reconnaissance implicite de ces affabulations.
Qu’elles soient ici formellement dénoncées, et que celui ou ceux qui pourraient – à un prix manifestement trop élevé- en tirer un bénéfice futur, s’honorent en prenant une position identique.